Deuil Blanc : pourquoi est-il si difficile à surmonter ?

Une proche aidante vivant un deuil blanc face à la maladie d'Alzheimer de sa mère
EN RÉSUMÉ

  • Le deuil blanc désigne la douleur de perdre symboliquement un proche toujours vivant, mais dont les capacités cognitives et la personnalité sont altérées (Alzheimer, accident, etc.).
  • Ce deuil particulier est progressif et sans repères rituels, ce qui rend son acceptation plus difficile et souvent source de culpabilité pour l’aidant.
  • L’aidant traverse des émotions mêlées – tristesse, colère, frustration – face à la perte de la relation d’avant et à l’impuissance devant la maladie.
  • Surmonter un deuil blanc implique de s’informer sur la pathologie, de s’entourer, de partager ses émotions et d’accepter de redéfinir la relation avec le proche malade.
  • Le deuil blanc prépare au deuil classique après le décès, en aidant à reconnaître et accepter la transformation définitive du lien.

Faire le deuil d’une personne disparue qui nous a été chère fait partie d’une des épreuves les plus difficiles de la vie. Les liens d’attachement qui nous unissent à elle peuvent provoquer un vide, une perte temporaire de sens. Plusieurs années sont parfois nécessaires pour accepter complètement la perte de la personne aimée. Plusieurs étapes sont souvent référencées dans le processus de résilience : le déni, la colère, le marchandage, la culpabilité, la dépression et enfin l’acceptation. 

Le deuil blanc complexifie le chagrin. Il présente une spécificité supplémentaire qui le rend plus difficile à surmonter. Celle ou celui que l’on a connu est toujours vivant mais ne présente plus la même personnalité. Il va alors être nécessaire de modifier l’ensemble des représentations et souvenirs que l’on avait de la relation pour s’adapter, parfois quotidiennement, à ce que la personne est désormais en capacité d’offrir. 

Les individus concernés peuvent avoir subi un accident entrainant des séquelles irréversibles, être atteints d’une maladie provoquant une dégénérescence cognitive qui altère leur autonomie ou encore subir des troubles neuronaux et cognitifs de type Alzheimer les empêchant de disposer de leurs pleine autonomie affective et mentale. 

Dans cet article, CetteFamille, entreprise de l’économie sociale et solidaire spécialisée dans les colocations seniors dont les maisons Alzheimer, vous accompagne sur cette thématique particulière en vous donnant toutes les clés.   

Deuil Blanc : définition

C’est principalement du point de vue de l’aidant que la définition a pris ses origines. 

Il peut être décrit comme le type de deuil que l’on ressent lorsqu’une personne atteinte d’un trouble cognitif n’a plus la même présence mentale ou affective que par le passé, bien qu’elle soit toujours présente sur le plan physique. 

Le lien est donc établi entre la poursuite physique de la vie de la personne et la déficience et dégénérescence de ses capacités cognitives qui entraînent pour l’aidant le constat que le proche n’est plus « en vie » comme il le connaissait auparavant. 

Il s’oppose à celui classique qui comprend notamment des rituels pour accompagner la phase d’acceptation : reconnaissance du corps, chambre funéraire, mise en bière. Par ailleurs, la dégénérescence progressive des facultés mentales pouvant aller de la confusion jusqu’à un état de sénilité peut s’étendre sur plusieurs années rendant le processus progressif, plus lent mais visible.  

Si cela implique de repenser les liens que l’on avait, les projets en commun, la réciprocité de la relation, il peut être vécu très différemment d’un aidant à l’autre et n’est pas forcément une épreuve irréversible qui provoquera du désespoir. Il est d’ailleurs tout à fait possible de constater chez l’aidant un état confusionnel de sentiments et émotions antagonistes. Il est impérieux qu’aucune culpabilité ne soit portée par l’aidant qui vivrait cela car ces ambivalences sont très couramment observées et sont en lien direct avec la maladie et l’adaptation que l’on en fait en tentant de trouver l’équilibre entre sa propre protection et le soin donné

LE SAVIEZ-VOUS ?

Le terme « deuil blanc » a été introduit en 1992 par Rosette Poletti, infirmière en soins palliatifs. Il désigne les pertes vécues par l’aidant face à un proche dont les capacités mentales disparaissent petit à petit, bien que la personne soit toujours physiquement présente. Contrairement au deuil classique, il n’existe pas de cérémonie pour marquer cette perte invisible, ce qui rend l’acceptation plus difficile.

Comment se manifeste un deuil blanc ?

Ce terme est souvent inconnu pour les aidants qui le vivent, ce qui implique qu’ils n’ont pas conscience d’être dans ce processus et peuvent se sentir coupables de ressentir des émotions impromptues et pouvant apparaître contradictoires. La plupart du temps toutefois, l’impuissance face à la situation entraîne une multitude de besoins insatisfaits alors qu’auparavant la relation pouvait les satisfaire : écoute, apaisement, épanouissement, etc. Face à ces besoins non nourris et à l’incapacité de les satisfaire, la colère, la frustration, la tristesse apparaissent comme moyen d’expression et de protection. Tant que ces sentiments se mélangent, le processus est en cours d’acheminement. 

Il est possible de reconnaître que le deuil est fait lorsque celui qui accompagne, accepte la perte de l’être aimé comme il était avant. Une fois que l’apaisement et la compréhension sont ancrés sur le fait qu’une nouvelle relation doit naître pour laisser mourir l’ancienne, l’aidant est plus disponible, ne serait-ce qu’à sa fonction puisqu’il n’attend plus que la relation le nourrisse. 

Dans le processus, il est indispensable de s’informer, d’être entouré, de reconnaître les émotions, qu’elles soient nommées et le moins possible refoulées. Cet accompagnement entraîne un lien direct sur la qualité des soins dispensés au malade puisque plus la frustration sera exprimée, moins elle se déchargera sur le patient. C’est pour cela qu’il est important de travailler dans le sens de l’enlèvement de sa culpabilité pour pouvoir exploiter les autres émotions moins paralysantes et qui font partie du processus. 

Parmi les solutions existantes pour aider l’aidant lorsqu’il a besoin de moments de répit, il existe notamment la possibilité d’une prise en charge Alzheimer à domicile, par l’intervention de personnel de soin. La prise en charge en établissement est également tout à fait envisageable. L’allocation personnalisée d’autonomie (APA) peut aider à financer ces mesures. 

Comment surmonter un deuil blanc ?

Chaque individu dispose de ses ressources, en lien avec son histoire. 

Il existe toutefois deux types de deuils blancs qui rendent le processus différent : 

  • L’« intuitif » : l’aidant exprime ses émotions à ses proches ou des personnes de confiance pour lui. 
  • L’« instrumental » : le chagrin reste intérieur. L’aidant se concentre pour analyser et agir. Notamment, il se renseigne et procède à des actions concrètes en lien avec la pathologie. Cette façon de gérer est souvent génératrice de stress comparativement au premier qui se vit plus aisément. 

Autant que faire se peut, l’aidant doit maintenir un équilibre émotionnel le plus souvent possible face aux grandes variations provoquées par la relation. 

Pour cela, il est notamment conseillé de: 

  • S’entourer et échanger avec des personnes vivant la même situation. Cela peut permettre d’alléger le sentiment de solitude et d’incompréhension. Il existe également des espaces spécialisés dans la maladie d’Alzheimer qui comprennent des personnes qualifiées en mesure d’évoquer le sujet avec l’empathie, la bienveillance et l’écoute attendue. Les personnes de la famille ou entourage proche peuvent aussi être des personnes ressources. 
  • Décider d’un placement temporaire en EHPAD au profit de la personne malade pour pouvoir prendre de la distance et déléguer l’accompagnement, le temps de retrouver sa pleine disponibilité pour mieux repartir. 
  • Se renseigner pour mieux comprendre la maladie et mieux se comprendre. La dégénérescence progressive entraîne des phases de transition et de développement de la maladie (crises de paranoïa, pertes de mémoire, agressivité, etc.) qui peuvent être subites et choquantes pour les aidants. Se renseigner permet d’avoir des outils et clés de compréhension et de mieux accompagner le malade. 
  • S’autoriser à utiliser les ressources à disposition : 
    • ateliers-rencontres organisés par des associations, 
    • sites ou organismes spécialisés sur la pathologie, 
    • forums et groupes de discussion, 
    • personnel soignant, neurologue et différents intervenants à domicile.
  • Paradoxalement, de vivre pleinement son deuil
LE CONSEIL CETTEFAMILLE

Ne restez pas seul face au deuil blanc : entourez-vous de proches, de groupes de soutien ou de professionnels. Partager vos émotions, vos doutes et vos peines permet de diminuer la charge émotionnelle et d’éviter qu’elle ne se reporte inconsciemment sur la personne aidée. Osez demander de l’aide, que ce soit pour des moments de répit, des conseils ou simplement un espace d’écoute bienveillant.

Comment se préparer au deuil qui suit le décès ?

Le deuil blanc est une étape préalable à celui dit « classique ». Avoir dépassé l’idée et ancré la connaissance que la relation ne sera plus jamais la même est une étape préalable mais indispensable au deuil qui surviendra après le décès. 

Même si maintenir une relation avec son parent dont on voit l’état se dégénérer est difficile, cela contribue au processus. Si la colère générée par l’impuissance provoquée par la dégénérescence a disparu, cela signifie que la reconnaissance de la maladie est pleine et entière. Cette étape est un préalable. 

Par la suite, un travail sur la déculpabilisation sera nécessaire à l’endroit de l’aidant, d’autant plus qu’il participe à l’ensemble des décisions de l’accompagnement relatives aux soins et traitements, les projets d’aménagement ou de fin de vie.

En dépit de l’incompréhension qui peut être ressentie par les proches quant à la notion vaste du deuil blanc, il est pourtant indispensable que les aidants soient entourés physiquement pour pouvoir verbaliser, répartir la charge émotionnelle avec et sur d’autres.

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